L’Ensemble Instrumental de la Mayenne (EIM) fait sa rentrée entre Bartok et Chostakovitch, musiques savantes et musiques populaires. A l’occasion de sa deuxième saison et de nouvelles collaborations artistiques, Mélanie Levy-Thiébaut, directrice musicale, propose une autre écoute et une nouvelle manière de diriger en toute liberté.
Vocation ?
J’avais 6 ans. En me réveillant un matin, une lumière m’est apparue et j’ai su que je voulais devenir Chef d’Orchestre, sans avoir conscience des études qu’il fallait faire et des difficultés que je rencontrerai. En 1970, j’habitais au Maroc où j’ai posé la première fois mes mains sur un piano. Ma Maman compositeur était à l’époque dans une recherche de musique avant-gardiste. Avec mon tourne-disque, je dirigeais mon propre orchestre. Nos goûts étaient très différents.
Manifesto ?
Quand vous êtes Chef invitée, on vous impose les choix et les manières de faire votre métier. J’avais envie d’imprimer un manifeste de l’Art du XXIe siècle, avec des concerts-débats et la parole au public. Créé en 2005, l’orchestre Manifesto vient de fêter ses 10 ans.
Association pour le progrès du management ?
L’association regroupe 250 clubs de chefs d’entreprises. Chaque mois, ils reçoivent un expert qui peut être guide de haute-montagne, financier, spécialiste en marketing ou chef d’orchestre. Nous débattons sur notre vision du métier. Il n’est plus possible aujourd’hui de manager sans écouter. Diriger, ce n’est pas commander. C’est échanger, guider et travailler en équipe. La responsabilité est ce qu’il y a de plus important : je réponds de mes actes.
Le métier ?
Nous sommes dans un système d’entreprise libérée, avec des syndicats très forts et des commissions d’orchestre artistique. Nous avons ouvert un poste de violon-solo qui est aujourd’hui le bras droit du chef d’orchestre. En répétition, nous n’avons pas le temps de faire des réunions. Acoustiquement et géographiquement, le chef restera le chef, dont la mission est fédératrice. Je fédère et insuffle avec les arts martiaux les énergies positives.
Le cinéma ?
La musique est un art sacré comme j’aime un amoureux. Le cinéma est ma passion et notamment le cinéma muet. J’ai appelé Marc-Olivier Dupin qui nous a dégoté un film jamais vu et qui mettra également en musique un western de John Ford.
Musique classique, musique savante ?
Bartok nous montre sa recherche de chansons et thèmes folkloriques. Des strophes très organisées sont liées à des rituels.
L’art pour les dictatures ?
L’art peut être une cible et en aucun cas ne doit être soumis. Métal, free-jazz ou contemporaine, la musique existe. La musique nous enseigne la connaissance, le partage et le plaisir. L’art parle toujours de manière plus fine que les êtres humains dans un débat.
Les moyens ?
C’est fantastique. Avoir beaucoup d’idées sans être épaulée, çà ne sert à rien. Je m’amuse énormément à travailler avec Baptiste Clément, dans la joie et les idées.
Femme d’exception ?
S’insérer dans la cité, posséder sa vision sur l’art et la société, élever avec les papas des enfants intelligents et ayant leur propre sensibilité. Les femmes ont plus le sens des responsabilités que du pouvoir, ce qui n’est pas négatif pour les hommes. Les hommes utilisent le pouvoir de façon magnifique et ce n’est pas notre outil.
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Propos recueillis par Christophe Feuillet et publiés dans le magazine de décembre 2015.