PASSIONS PRÉHISTORIQUES
La préhistoire désigne la période chronologique de la vie de l’humanité qui va de l’apparition de l’homme à l’invention de l’écriture. La première période, qui s’achève il y a 10 000 à 12 000 ans, est appelée le «paléolithique» et se caractérise par l’apparition et le développement de l’industrie de la pierre et par une économie de prédation et de cueillette. Créé en 2008, le Groupe de recherches archéologiques de la Mayenne (GRAM) œuvre autour de 3 axes : recherche, formation et communication. A sa tête : Bernard Bodinier, instituteur retraité.
Bernard Neanderthalensis ?
Je suis originaire de Coudray, où ma mère était institutrice et mon père secrétaire de Mairie. Je me suis installé à Villiers-Charlemagne au XXIe siècle, sur les bords la Mayenne. J’habite à côté d’une carrière, un site un peu particulier sur lequel il y a eu des décapages de terrain. Ce n’est pas au plus profond que je fais mes premières trouvailles, mais dans une zone où on a enlevé une dizaine de centimètres de terre végétale. Parce que toute ma vie j’ai été passionné d’animaux, plus particulièrement rampants comme les insectes, j’observe le sol plus que le ciel. Lors d’une promenade, j’ai découvert mes premiers silex. A 45 ans, je n’avais encore jamais manifesté d’intérêt spécifique pour l’archéologie. J’ai continué mes prospections et contacté les personnes compétentes pour dater ces pierres qui sont extrêmement rares et méconnues, surtout dans l’ouest de la France et qui remontent au paléolithique supérieur, soit il y a environ 12 000 ans. Ce site a bénéficié de 5 années de fouilles par une équipe du CNRS.
Gram Erectus ?
A l’origine de ce groupement, il y a Gwénolé Kerdivel, un archéologue qui étudiait les liens entre le massif armoricain et les bassins parisiens et aquitains. Il a contacté tous les prospecteurs, dont je fais partie, qui passent beaucoup de temps dans les champs et dans les terrains vierges de végétation. Depuis la Normandie jusqu’à la Vendée, il a souhaité nous fédérer. Notre objectif premier était de mutualiser nos découvertes. Puis sont arrivés des projets de prospections et fouilles collectives, dont un en Mayenne qui a duré 2 ans sur une carrière de dolérite, une roche qui a servi aux premiers agriculteurs du néolithique à fabriquer des haches polies, permettant le défrichage des forêts.
Découverte Habilis ?
Il n’y a pas de découverte majeure récente. Celle de la dolérite s’est faite suite à plusieurs années de prospection dans une région qui se trouve aux alentours de Saint-Germain-le-Guillaume, Saint-Germain-d’Anxure et Andouillé. Nous avons cherché et repéré au bout de 3 ans des petits éclats de roche taillée intentionnellement. Nous avons mis en évidence une carrière de Bizeux.
Culture Australopithecus ?
Dans le cadre d’un spectacle qui sera créé début juillet, j’accueille la Compagnie des Arbres et des Hommes pour initier les acteurs et les remettre dans l’ambiance de la préhistoire, avec quelques éléments de taille de pierre et également d’outillage avec du tir au propulseur. Nous avons aussi abordé des questions d’ordre très général, notamment notre place actuelle, celle de l’Homo sapiens, dans la lignée de l’évolution humaine.
Bodinier Sapiens ?
Je revêts parfois un costume néolithique. Dans les objectifs de notre association, il y a la communication avec le public. Nous sensibilisons via des publications scientifiques mais surtout par des manifestations de présentation de la préhistoire. Nous étions récemment à la fête de l’Histoire à Laval et serons à Saulges à l’occasion des journées nationales de l’archéologie. L’essentiel demeure dans nos échanges très riches avec le public.
Égalité Homo ?
Je m’intéresse beaucoup à l’homme de Néandertal, encore considéré comme un pré-homme. Je crois qu’il avait autant de valeur humaine, culturelle et artistique que nous. Je n’admets pas que l’on puisse faire de différence à ce niveau.
Plus d’infos sur : http://gram.over-blog.com
Propos recueillis par Christophe Feuillet et publiés dans le magazine de juin 2019.